Lutry – Des œuvres de Walter Mafli pour protéger le centre de Corsy
Opposée à la construction d’une villa mitoyenne, une association veut racheter la parcelle située à côté de l’ancienne habitation du peintre.
Son objectif est de conserver le tilleul protégé et de créer un jardin public en l’honneur de l’artiste.

Des œuvres de l’artiste Walter Mafli seront mises en vente à cet effet
Problème d’intégration, d’urbanisme et de biodiversité, le projet immobilier dans les hauts de la commune de Lutry fâche les riverains. Pour preuve, les opposants veulent racheter le terrain pour empêcher la construction d’une villa mitoyenne de deux logements. Une exposition-vente de plusieurs œuvres de Walter Mafli est d’ores et déjà prévue du 5 au 20 novembre prochain dans une galerie voisine. La somme est cependant considérable, car au-delà des 677’000 francs nécessaires au rachat de la parcelle, il faut ajouter les frais administratifs et de mobilier : « Notre projet est estimé à 780’000 francs, mais ce terrain mérite d’être sauvegardé. Ne serait-ce que pour sa biodiversité », annonce d’entrée de jeu un membre de l’association Les Amis de Corsy.
« Ce terrain mérite d’être sauvegardé. Ne serait-ce que pour sa biodiversité »
Les Amis de Corsy
Derrière l’ambition de maintenir l’un des derniers espaces verts de la localité, l’association qui chapeaute le mouvement des opposants souhaite développer un parc en mémoire de l’artiste décédé en 2017 et qui vivait juste à côté depuis 1946 : « Nous voulons créer un parc public convivial et didactique, ouvert à tous et axé sur le travail de l’artiste ainsi que l’histoire du hameau ».
Bien situé au cœur de la commune, le Jardin Mafli serait constitué de bancs, de bacs à plantes, de tables faites de mosaïques du peintre, de panneaux pédagogiques, le tout, en préservant l’âme de la parcelle, le tilleul centenaire.
Projet immobilier revu
Le propriétaire de la parcelle avait déjà proposé un premier projet : « Acceptée par la commission ville et villages en 2021, la version initiale a été recalée après plusieurs interventions », mentionne le site web de l’association Les Amis de Corsy. Considérée trop volumineuse et disparate par rapport aux maisons anciennes et vigneronnes, la régie Immosol SA a depuis revu sa copie mais le tilleul sera malgré tout abattu si ce nouveau projet immobilier venait à voir le jour.
Mis à l’enquête publique du 21 mai au 19 juin 2022, ce sont 44 oppositions qui ont été recueillies par les autorités cantonales. Prêts à en découdre, Les Amis de Corsy ont récolté 1046 signatures du 3 juin au 18 juin 2022 : « On nous a dit que notre pétition aurait un impact dès 300 engagements », se réjouit un membre de l’association. La démarche est par ailleurs soutenue par l’association Sauver Lavaux, la Fondation Franz Weber, Pro Natura, Patrimoine Suisse et VisarteVaud.
Tilleul en danger
Le projet fait également parler de lui au Grand Conseil. Un député a déposé début octobre une interpellation au Parlement vaudois afin d’obtenir de l’aide cantonale : « Ma démarche est de demander au canton s’il est
disposé à soutenir financièrement la création d’un parc Mafli », détaille Marc Vuilleumier. La réponse de l’Etat pourrait bien être similaire à celle de la commune : « Il s’agit d’une parcelle privée, nous ne sommes donc pas habilités à son rachat. Cependant, nous sommes ouverts à participer à l’acquisition du mobilier urbain et à l’entretien du parc s’il voit le jour », précise Pierre-Alexandre Schlaeppi, municipal en charge de l’aménagement du territoire et des bâtiments à Lutry. Ce dernier laisse entendre que sa commune pourrait s’impliquer davantage si cet endroit devient un lieu de vie public.
Pour la Municipalité, la mise en œuvre de la modification du plan d’affectation de cette partie de Lutry ne sera envisagée qu’à partir de 2024 : « Cette parcelle se trouve sur ce que l’on appelle un territoire d’agglomération. Le canton nous oblige à garantir la constructibilité de ce type de terrain », ajoute Pierre-Alexandre Schlaeppi. « Concernant le tilleul protégé, un nouveau dossier de mise à l’enquête publique d’abattage doit être déposé par le constructeur, ce qui n’a pas encore été fait ». L’exécutif devra donc attendre la fin des deux procédures avant de pouvoir statuer sur les oppositions recueillies durant tout le processus.
Recherche de fonds
Le propriétaire étant ouvert à l’acquisition de la parcelle par l’association, il reste cependant que : « Les 677’000 francs pour le rachat de la parcelle ne seront pas chose facile à acquérir », avoue l’association Les Amis de Corsy. Contacté à ce sujet, Immosol SA n’a pour l’heure pas répondu à nos questions.
Si la parcelle devient la propriété de l’association Les Amis de Corsy, le parc Mafli verra le jour entre 2023 et 2024.
Pour maximiser la récolte financière en cours, la recherche de fonds s’articule sur trois axes. A savoir, la vente des œuvres du peintre vaudois du 5 au 20 novembre, les donations de particuliers et le soutien de fondations et institutions. « En cas d’échec du rachat de la parcelle, tous les dons versés seront restitués aux donateurs », précise les membres de l’association Les Amis de Corsy.


