“Miséricorde” – Thriller dans le Grand Nord
«Miséricorde», une fiction du réalisateur suisse Fulvio Bernasconi
Colette Ramsauer | Le film nous plonge dans les grands espaces canadiens où, suite à un accident de la route, ressurgissent racisme, culpabilité et pardon. Repris par le scénariste Antoine Jaccoud, le scénario inachevé du journaliste écrivain Pierre-Pascal Rossi (décédé en 2016), c’est d’abord l’histoire d’un flic genevois, Thomas, qui, lors d’un séjour en solitaire au Canada, tente de se remettre d’un drame familial dont il est responsable. Il a tué non intentionnellement son enfant en le secouant. La mère du bébé lui pardonnera-t-elle? Un fragment de réponse l’attend ici dans le Grand Nord.
Adolescent percuté
Panne sèche après une journée de pêche à la ligne. Thomas chemine alors à pied le long de la nationale où soudainement il est témoin d’un accident incluant un délit de fuite. Percuté sur son vélo par un poids lourd, Makki, adolescent amérindien, est tué sur le coup. Commence alors un thriller avec pour toile de fond les transports de grand transit sur des routes quasiment désertes menant aux confins nord vers des carrières en exploitation. Atmosphère lourde, glaciale, qu’allège heureusement le ressenti poétique du caméraman Filip Zumbrunn.
De quoi se mêle-t-il
Ne parvenant pas à convaincre des faits réels la police locale corrompue, Thomas mène sa propre enquête. Faire justice devient une manière de se racheter, de se libérer du poids qui l’accable. Mais de quoi se mêle-t-il, celui-là? Loin d’accepter sa démarche acharnée, la police locale exige son départ en Suisse, illico presto. Poursuivant malgré tout ses recherches avec le soutien de la mère de Mukki qui ne lui est pas inconnue, il finit par débusquer le camion recherché et son conducteur. Il découvre vieilles rancœurs subsistant dans la communauté amérindienne, luttes et vaines revendications.
Pardon
Thomas revient au pays réconforté d’avoir pu élucider un drame, étonné par les étranges rites funéraires des Amérindiens, mais surtout par leur faculté de pardonner. La dernière séquence est celle de son arrivée à l’aéroport où l’attend sans sourire la mère de son enfant perdu. Aura-
t-il droit au pardon? Le réalisateur Fulvio Bernasconi laisse ouverte la question.
Navrant, mais hélas fréquent
L’acte de secouer un bébé, hélas fréquent, souvent imputé à un parent excédé par les pleurs de l’enfant et qui peut paraître anodin à certains, est en réalité bien plus grave qu’une chute du bébé de la table à langer, par exemple. Il est reconnu comme une maltraitance sur mineur que le soignant est tenu de signaler aux autorités légales afin de procéder à une enquête, car l’enfant décède dans 13 à 40% des cas; et s’il survit, une fois sur deux, il y a récidive. (Wikipédia)
«Miséricorde»
de Fulvio Bernasconi – Suisse/Canada, 2016 – 90’ – vo st – âge 14/16 ans avec Jonathan Zaccaï, Evelyne Brochu, Daniel Gadouas, Marie-Hélène Bélanger et Marthe Keller. Au cinéma de Chexbres les 2 et 3 juin à 20h30