Proches aidants en Lavaux-Oron
S’il y a de l’amour et de la volonté, tout est possible

Gil. Colliard | Proches aidants peut revêtir une grande diversité de cas de figure. Aussi, après l’aide au sein du couple évoquée dans notre article du 3 octobre dernier, nous avons reçu le témoignage de la maman du petit Nicolas, 9 ans, atteint d’amyotrophie spinale type 2, un trouble neuromusculaire qui commence à l’enfance ou à l’adolescence et qui entraîne une faiblesse musculaire progressive.
Le Courrier: comment avez-vous reçu la nouvelle de la maladie de Nicolas?
J: Nicolas est né en parfaite santé, c’était un bébé joyeux qui donnait l’impression d’être déjà grand, mais à 5 mois, il n’avait pas de stabilité en position assise ce qui nous a inquiétés. Après avoir vu plusieurs médecins, le diagnostic est tombé: amyotrophie spinale de type 2, défaillance d’un chromosome qui donne la force aux muscles. On nous a rassurés quant à son développement mental tout à fait normal, mais le choc a été énorme. Le soir même, nous avons pris la décision de ne pas baisser les bras, de nous mettre sur les rails pour lui donner toutes les chances. Une des premières réactions de mon mari fut de penser que la joie avait quitté notre famille. Heureusement nos jours sont faits de 90% de joie et de 10% d’angoisse. Nous n’avons jamais passé une journée sans lui.
LC : qu’avez-vous mis en place pour Nicolas?
J: nous avons contacté un team de professionnels, ergothérapeute, physiothérapeute, etc., des gens extraordinaires, aujourd’hui considérés comme des membres de notre famille. Avec eux, nous faisons tout notre possible pour que Nicolas puisse découvrir l’espace avec différents moyens auxiliaires. Je parcours le net à la recherche des avancées médicales et ainsi nous avons eu connaissance d’un nouveau traitement en essais cliniques aux USA. Nous avons inscrit notre fils, âgé alors de 4 ans, pour ce programme à Paris, mais il n’entrait pas dans les critères. En restant toujours en contact pour connaître le développement de cette thérapie, nous avons pu obtenir en France, les quatre premières doses de charge du traitement, alors qu’il n’était toujours pas reconnu chez nous. Quatre voyages que nous avons agrémentés par des visites de musées pour le plus grand plaisir de notre fils. Par bonheur, nous avions le soutien d’un médecin du CHUV et il a été le premier enfant à obtenir, ici, ce médicament qui combat cette maladie évolutive. Il reçoit une injection tous les quatre mois en milieu hospitalier où je reste avec lui. Au début du traitement, il avait une motricité de 4 et aujourd’hui elle a 8. Il a plus de force.
LC : de quoi sont faites vos journées?

J: on se bat pour sa santé et non contre. Deux fois par jour, on fait du stretching et de l’extension. Son papa l’accompagne 3x par semaine à la piscine. Il adore nager, les mouvements sont facilités. Je fais très attention à son alimentation. Il suit des cours d’anglais et il a une enseignante spécialisée en informatique, pour laquelle il a un fort intérêt. On a adapté une luge, bientôt une barque; il se passionne pour la pêche. Il est scolarisé dans l’établissement scolaire Oron-Palézieux, où il a une assistance. Il a un très bon contact avec ses camarades qui viennent souvent à la maison.
LC : qu’est-ce qui a changé radicalement dans votre perception de la vie?
J: avant j’avais des projets, j’étais travailleuse. J’avais une vision de ma vie professionnelle ambitieuse. Là, tout s’est arrêté d’un coup. J’ai appris à vivre au jour le jour. De temps en temps j’écris pour le plaisir, pour m’évader de cette routine. Je suis parfois triste, je me questionne sur l’avenir. Mais, je ne connais pas la vie avec un enfant qui s’habille lui-même. Nicolas est facile à vivre, il est mature. Il mange seul maintenant. Il gère son fauteuil pour ses déplacements. Je n’ai pas de souci avec les devoirs, il est studieux. Il a accepté son handicap et sa phrase est : « La vie est belle, j’adore la vie. C’est génial d’être Nicolas ! ». D’autres solutions existent, mais pour le garder en forme, il est important de continuer ainsi. Bien sûr, il y a la fatigue et le manque des grands-parents qui ne sont pas ici.
LC : avez-vous trouvé facilement des aides?
J: nous n’avons pas de soucis financiers, nous bénéficions de l’AI qui prend aussi en charge les moyens auxiliaires. Mon mari, employé à l’Etat de Vaud, est considéré comme proche aidant et peut avoir des jours de congé, hors vacances. Le monde médical nous a mis sur la piste pour des aides. Mais il a fallu faire des recherches sur tout ce qui existe, sur nos droits, sur les possibilités de traitements. Tout ça prend de l’énergie. La vie de l’enfant dépend de l’implication de ses parents. Nous avons beaucoup de chance de vivre en Suisse, ce n’est pas partout pareil. Je ne souhaite cette vie à personne, mais elle nous apporte énormément d’amour. Ce n’est pas une vie ordinaire, mais il y a beaucoup de beauté dans tout ça.