Portrait – Jean-Michel Trolliet, parcours d’un protecteur des milieux aquatiques
Un métier qui se pratique tout à la fois dans la solitude et en interaction avec le service des eaux

Gil. Colliard. |. Après 22 ans de bonheur dans sa profession, le 31 mars dernier, Jean-Michel Trolliet a choisi de mettre fin à sa carrière de garde pêche permanent. Un terme qu’il juge obsolète et auquel il préfère: agent de la nature. Un métier qui se pratique tout à la fois dans la solitude et en interaction avec le service des eaux, les Municipalités, les autres gardes : faune, chasse, forestier, la gendarmerie.
Garde pêche à la troisième postulation
Né en 1958 à Vucherens, dans une famille d’agriculteurs, Jean-Michel Trolliet a effectué une formation de mécanicien électricien auprès de l’entreprise Bobst à Lausanne avant de passer deux années à travailler pour la serre tropicale de Servion. Il a occupé les deux années qui suivirent à tenir un magasin d’articles de pêche à Lausanne, puis a passé 14 ans au service après-vente dans une entreprise de balances électroniques et machines de tri de monnaie. Enfin, après une troisième postulation, il obtint le poste étatique, en 1996, de garde pêche sur le lac Léman. Maîtrise en poche au bout de 5 ans, il vivra pleinement cette période au contact des pêcheurs avant de revenir aux sources en 2009 et pratiquer les 10 dernières années de sa carrière comme garde pêche permanent de la région d’Oron-Moudon. « J’ai choisi d’arrêter à 60 ans. L’envie de continuer était encore là, mais j’aime décider. Je laisse donc ma place après 22 ans de bonheur. Quand on est optimiste, curieux et qu’on aime son travail, on devrait vivre jusqu’à 120 ans ! » s’exclame en souriant le jeune retraité.
Il est agréable d’être important, et il est important d’être agréable
La fonction de garde pêche, bien que mal connue, est très variée. Elle demande une capacité à compter sur soi tout en aimant la communication. Il faut connaître la nature, le terrain, les lois, savoir rédiger des rapports. « Au printemps, nous mettons les petits poissons dans les rivières. Il nous faut aussi enlever les poissons morts lors de pollution, en rechercher la cause et le responsable, faire la dénonciation. Notre travail est également important au niveau de la préservation des nappes phréatiques. Nous assurons une protection globale des milieux aquatiques. Notre activité est identique à celle d’un garde forestier, la tâche de police en plus. Nous sommes les gendarmes de la nature » explique Jean-Michel Trolliet qui a mis un point d’honneur à être visible et à rechercher une solution, jugeant l’amende comme un aveu de faiblesse et préférant l’explication avant la sentence.
Relever le côté positif des gens, éviter de les écraser
Ce passionné de nature se balade toujours avec un cornet poubelle, déclarant la guerre aux déchets et regrettant que nous oubliions que l’homme n’est que locataire sur Terre. « La nature est une bonne école de vie, si nous la respectons, nous avons du respect pour nos semblables. Cette éducation doit se faire dès le plus jeune âge. » Il illustre son propos en relatant l’aventure d’un adolescent pris à pêcher sans permission pour lequel, avec l’accord des parents, il a commuté son amende en journée de nettoyage de la Broye, en sa compagnie, entre Lucens et Moudon. En deux décennies, la profession a changé, il a fallu s’adapter à l’informatique. Les tâches administratives représentent de 30 à 40% du temps, en fonction de l’incivilité des gens. Ils sont stressés, ne prennent plus le temps de regarder autour d’eux. L’agressivité est en augmentation. Aujourd’hui, une large majorité des pêcheurs sont des étrangers. C’est une population qui va en vieillissant, tout comme les chasseurs. Pas de retraite ennuyeuse pour Jean-Michel Trolliet. Il a gardé une fonction de garde pêche auxiliaire dans le Pays d’Enhaut, quand on est passionné on ne se refait pas ! Cet ancien gymnaste qui fut aussi moniteur, déborde d’énergie qu’il consacre aux champignons, à la pêche mais aussi aux voyages, tout particulièrement l’Argentine, où il s’improvise à l’occasion guide. La lecture et la musique font également partie de ses intérêts. Souhaitons-lui de profiter pleinement de son temps. Un temps qui passe très vite en sa compagnie, tant il excelle dans la manière de conter sa passion.
Depuis le 1er mai, le poste de garde pêche permanent à 100% de la région d’Oron-Moudon a été repris par Julien Girardier, 32 ans, habitant le Nord Vaudois. Horticulteur paysagiste de formation, il a effectué une carrière militaire professionnelle avant de reprendre cette fonction.