Ron Rash, l’écrivain et le lecteur
Ron Rash, la tête d’affiche du festival littéraire « L’Amérique à Oron », a clos cette édition 2022. Entre un déjeuner à Grandvaux et une séance de dédicaces à la librairie, l’écrivain à succès nous livre ses impressions avant son retour aux USA. Interview.
Comment vous êtes-vous rencontré avec les organisateurs de l’Amérique à Oron ?
Nous avons fait connaissance au Festival America avec Marie Musy en 2016. Cette rencontre était tellement improbable que je m’en souviens comme si c’était hier (rire). La manifestation dédiée à la littérature d’outre-Atlantique qui a lieu dans la région parisienne (Vincennes) est un vrai marathon pour les écrivains. J’avais dix minutes pour rejoindre un journaliste après une séance de dédicace, mais il y avait plus de 15 minutes d’attente aux toilettes. Tout à coup, j’entends une petite voix me dire : Monsieur Rash, vous pouvez aller aux toilettes des femmes, il n’y a personne. C’est comme ça que tout a commencé. Nous nous sommes revus plus tard avec Marie et elle m’a parlé du festival « L’Amérique à Oron ».
Ce matin, vous étiez à Grandvaux pour échanger vos expériences avec dix personnes, comment s’est passé ce déjeuner ?
C’était un message vers le monde. Vous savez, quand j’écris, je suis seul dans une pièce sans fenêtre pour ne pas perturber la créativité. Alors cela fait tellement du bien de partager ses expériences avec le public. Il est aussi rassurant d’apprendre que nous sommes également lus.
Ron, on m’a dit que vous étiez un amateur de vin rouge. Préférez-vous le vin suisse ou le vin américain ?
Le vin de votre région possède une meilleure longueur en bouche. Cela en fait un produit avec une plus grande sensibilité. Donc, sans hésiter, le vin suisse.
Quels sont les écrivains qui ont marqué votre vie ?
Charles-Ferdinand Ramuz m’a transporté dans les paysages montagneux de Derborence (dans l’ouvrage du même nom). Ses livres sont incroyables, car la description des paysages plonge le lecteur dans une nature impressionnante. Du côté américain, on retrouve de nombreux auteurs décrivant les panoramas des Etats-Unis avec brio. Ces écrivains m’ont fasciné et me fascinent encore aujourd’hui. C’est le cas de CF Ramuz.
Un livre qui a changé votre vie ?
Plusieurs ouvrages m’ont bouleversé, mais « Crime et châtiment » de Fiodor Dostoïesvski m’a transformé. J’avais quinze ans à l’époque et c’est cet ouvrage qui m’a donné envie d’écrire. Il est aussi responsable d’une de mes plus mauvaises notes de biologie au collège (rire) car je le lisais camouflé durant les cours. C’est à ce moment que je me suis rendu compte du pouvoir de l’écriture. Publié pour la première fois en 1866, ce livre est l’exemple de la communion qu’il peut y avoir entre l’écrivain et les lecteurs. Et ce, même plusieurs siècles après la première publication.
Quelles sont vos sources d’inspiration ?
Il y en a beaucoup. Mais je dirais que je puise ma créativité dans la nature. Je pêche régulièrement, cela me permet de réfléchir et de contempler les paysages en même temps. Les truites vivent dans des cours d’eau propres et sauvages, c’est un excellent moyen d’inventer des histoires.
Auteur de sept romans et de nombreux poèmes, vous avez atteint une belle notoriété dans le monde littéraire, quel est votre secret ?
(Rire) J’écris pour me sentir bien, j’en ai besoin. D’ailleurs, j’écris tous les jours, avec plus ou moins de réussite, parfois juste comme ça, pour libérer mon esprit. L’art permet d’explorer les richesses de l’homme comme l’amour, la tristesse ou la joie. L’écriture doit être au service de ces particularités qui font la beauté de notre espèce.
Quel conseil donneriez-vous aux personnes qui s’essaient à l’écriture ?
La chose la plus importante est de lire. A l’image des musiciens qui écoutent beaucoup de musique pour apprendre sans réellement pratiquer. Il faut s’inspirer des meilleurs tout en trouvant sa propre voie. L’écriture c’est comme une grande soupe, on mélange plusieurs ingrédients avant de faire un bon repas. Après plusieurs soupes, il est crucial d’intégrer de nouveaux ingrédients pour varier les plaisirs et apprendre.
Qu’allez-vous rapporter de votre séjour en Suisse à vos proches ?
J’ai goûté un fabuleux bœuf fumé d’une boucherie locale. Voilà deux semaines que je voyage, alors je vais essentiellement rapporter des souvenirs dans mes bagages.
Qui est Ron Rash ?
Né le 25 septembre 1953 dans la petite ville de Chester en Caroline du Sud, Ron Rash se voit décerner le Grand Prix de littérature policière en 2014. « Serena », son premier roman policier, est adapté au cinéma en 2014 par Susanne Bier avec Jennifer Lawrence et Bradley Cooper dans les rôles principaux.