L’encadreur du Jorat : 30 ans au service de l’art
Gil. Colliard | Si l’on ne disposait que d’un seul mot pour définir Anthony Guyot, l’encadreur du Jorat, ce serait sans conteste: passion ! Passion pour son métier, pour le sport, pour tout ce qu’il entreprend: pour la vie tout simplement. Il vous accueille dans sa boutique, aux murs recouverts de tableaux d’artistes connus et modestes, aux détails remarquablement rehaussés par un encadrement adéquat. Interrogez-le sur son métier: doreur-encadreur, aussitôt ses yeux bleus pétillent et il vous régale en explications et anecdotes. «Je suis au service de l’œuvre, tel un architecte de l’extérieur» aime-t-il à se qualifier. Apportez-lui une toile à encadrer, il vous écoute, mais déjà son esprit élabore un projet.
Un terme: « doreur-apprêteur » à l’origine de sa carrière
A 15 ans, ce natif de Prilly quittait l’école sans idée précise sur son avenir professionnel. Il aimait travailler de ses mains et il y avait bien ce terme: doreur-apprêteur qui le séduisait. Mais comme une menuiserie se trouvait à côté de la maison familiale, il y débuta son apprentissage. Très vite, la rusticité du métier le lassa. N’osant décevoir son père atteint dans sa santé, il s’encouragea jusqu’au décès de ce dernier, qui intervint 18 mois plus tard. Il prit alors son destin en main et se trouva une place d’apprentissage de doreur-encadreur dans une fabrique de baguettes industrielles. Là, en trois ans il apprit le métier et acquit précision et rapidité. Après 8 mois passés à Morges auprès d’un encadreur passionné de gravures anciennes, il entra, à Berne, au service d’un maître en la matière, qui avait acquis son art à Paris. Déprimé, dans un premier temps, devant les exigences de son nouveau patron, le jeune homme, à force de curiosité et de travail, sut montrer ses capacités. 4 ans plus tard, le 3 février 1986, ayant assimilé les techniques les plus fines, telle la dorure à l’ancienne, il ouvrit son propre commerce dans l’ancienne laiterie de Mézières. Bien que l’espace ne soit pas grand, il y est bien. L’atelier jouxte la partie dévolue à l’accueil et à l’exposition, dont les vitrines donnent sur la rue. Aussi méticuleux et minutieux dans son travail que dans sa gestion, il a mené son entreprise à bien. Il y a 17 ans il a acheté, à Carrouge, un vieux moulin tombant en ruine. Pendant 10 ans, il l’a restauré et y a créé un appartement pour sa famille et un pour sa maman, réalisant la promesse faite à son papa de prendre soin de cette dernière. Sportif également, il s’est toujours donné à fond dans de nombreuses disciplines, trouvant ainsi un équilibre entre le côté méticuleux de son métier et l’effort de l’entraînement.
Respect de l’œuvre quelle qu’elle soit
Au fil des ans, il a su fidéliser sa clientèle par la qualité de son travail. «Je trouve mes idées en pénétrant dans la toile, l’objet, et je les laisse m’inspirer», décrit-il. Il crée son cadre en parlant avec son client, parfois en se déplaçant chez ce dernier pour trouver la symbiose avec l’intérieur. Il lui arrive de revoir sa copie, si le résultat n’est pas à la hauteur de ses espérances ou de celles de son client. Disposant d’un dépôt pour son bois, il fait ses créations de A à Z. Il scie, rabote, ponce, peint dore, patine, etc. et restaure aussi les œuvres qui lui arrivent parfois fortement délabrées. Il pratique également l’art délicat de la dorure d’objets tels que statues, coqs d’églises, etc. Lui qui aime travailler seul et de manière indépendante partage avec plaisir des moments chaleureux avec les autres artisans et artistes autour de lui. «Ce sont des instants enrichissants, véritables, non axés sur l’argent, loin de ce monde où il faut manger l’autre et gagner à tout prix», commente-t-il. Son métier, il l’a transmis en donnant des cours pratiques aux apprentis à Vevey, avant que l’école parte pour Berne. Insatisfait de nature, malgré ces trente années qui ont passé sans atténuer son caractère, il est toujours à la recherche de l’amélioration et est à l’écoute des modes et tendances. Il déplore le manque de sérieux de certaines enseignes qui font du «prêt à encadrer» sans goût et sans âme. Travailler sans intermédiaire lui permet de fixer ses prix au plus juste, ce qui avec la qualité de son travail et son écoute lui a permis de se lier avec une clientèle fidèle qui apprécie aussi les moments privilégiés partagés en sa compagnie, car l’homme a une belle culture artistique.
L’encadreur du Jorat
Anthony Guyot
A côté du Théâtre du Jorat, parking à disposition
Rue du Théâtre 10 – 1083 Mézières
021 903 22 45 | 079 611 65 25
www.encadreur-du-jorat.ch