La petite histoire des mots
Hooligan

Georges Pop. |. Après deux matches interrompus à Lucerne et à Sion en raison d’actes de violence, la conseillère fédérale Viola Amherd a dit la semaine dernière vouloir sévir contre les hooligans pour améliorer la sécurité dans les stades. Elle propose notamment que les supporters brutaux soient systématiquement bannis des enceintes sportives par les clubs, sans attendre un quelconque jugement. Le mot « hooligan » qui peut aussi s’orthographier « houligan » est assurément d’origine anglaise et désigne généralement un individu qui se livre à la violence et s’adonne au vandalisme, notamment lors de rencontres sportives. Il est certain que le terme est apparu outre-Manche en 1898. Mais il existe plusieurs hypothèses sur son ascendance. Selon la plus populaire, Patrick Hooligan était un poivrot irlandais résidant à Londres. Querelleur et grossier, il était souvent impliqué dans des rixes. Son nom revenait si souvent dans les rapports de police, que la presse anglaise aurait fini par l’associer à toutes les sauvageries urbaines. Le mot se serait ensuite imposé dès 1899 grâce à un livre à succès intitulé « The Hooligans nights » (La nuit des Hooligans) écrit par Clarence Rook, un journaliste fasciné par l’animation dévoyée des bas-fonds de la capitale britannique. Suivant une autre hypothèse, le mot serait un dérivé du nom « Houlihan » porté par une famille irlandaise connue à Londres par sa férocité et son mode de vie quelque peu bestial. Il est aussi question d’un gang enragé appelé « Hooley ». Peu importe ! Le fait est que le mot, en Angleterre, se popularisa très vite pour désigner un voyou. Il fut notamment adopté dès le tout début du 20e siècle par des écrivains tels que H. G. Wells, l’auteur de « La guerre des mondes » et Conan Doyle, le créateur de « Sherlock Holmes ». « Hooligan » se répandit ensuite comme une traînée de poudre sur le continent, et notamment en Russie. En URSS, sous le régime communiste, le terme ne désignait pas seulement une fripouille ou un individu asocial mais aussi un opposant au régime. Nombre de dissidents furent ainsi condamnés pour « hooliganisme » par les empesés tribunaux soviétiques. « Hooligan » fit une timide apparition dans la langue française dès le début du 20e siècle. Le futur président français, Georges Clémenceau, en parlait ainsi dans le journal « L’Aurore » dès l’année 1900 : « Les hooligans sont ces jeunes voyous que rien n’arrête et qui sont encore, dans plusieurs districts, la terreur des citoyens paisibles ». Selon le « Robert », cependant, le terme ne se serait popularisé en France qu’à partir de 1925, par l’intermédiaire du russe, conséquence sans doute de l’arrivée massive dans le pays de réfugiés fuyant le régime communiste. Depuis la seconde moitié du 20e siècle, le mot désigne essentiellement les supporters de football ultra-violents et presque toujours aussi bourrés que Patrick Hooligan, leur tristement célèbre devancier.