A la rencontre des gens d’ici :
Ilda (Ecoteaux)
Georges Pop | « Lorsque je suis arrivée en Suisse, il y a 26 ans, je ne parlais pas un mot de français et je ne connaissais rien à la restauration ».

Confortablement assise, à coté de Luis, son époux, devant une table du café-bar La Gondolière, à Puidoux-Village, Ilda Silva, 51 ans, esquisse un petit sourire amusé en feuilletant les pages de sa mémoire. « Nous étions boulangers, dans une petite ville au nord de Porto. Après avoir cuit le pain, il nous fallait encore le livrer. Le travail et la situation, là-bas, n’étaient pas toujours faciles, c’est vrai ! », explique-t-elle avec douceur, dans un français joliment épicé de ces intonations propres aux Portugais qui ont embrassé la langue de Molière.
« A cette époque, la sœur de mon mari travaillait au restaurant Le Pigeon, à Forel. Elle nous a proposé de la rejoindre, car il y avait aussi du travail pour nous. Alors, nous sommes partis ! » A son arrivée en Suisse, le couple s’installe à Forel. Ilda se familiarise avec son nouveau cadre de vie, travaille au Pigeon puis dans plusieurs établissements de la région. Il y a quelques années, la petite famille, qui s’est entretemps enrichie d’une petite fille puis d’un petit garçon, nés en Suisse, s’installe à Ecoteaux. « L’endroit est joli et c’est calme. On est bien intégré. Les enfants sont suisses. Ils ont aujourd’hui 18 et 12 ans. Et puis je ne suis pas loin de mon travail », précise l’ancienne boulangère.
Le travail d’Ilda ? Depuis bientôt quatre ans, cette femme, dont la gentillesse dissimule une rare détermination, tient fermement les rênes de La Gondolière. « Il y avait l’opportunité de reprendre ce café que tenait un compatriote. Nous l’avons saisie. Cet endroit contribue énormément à la vie villageoise. Les anciens, ici, sont de très fidèles clients. Il nous soutiennent énormément et nous leur devons beaucoup. Lorsqu’ils viennent le matin, certains n’ont même pas besoin d’ouvrir la bouche. Je sais exactement quoi leur servir ».
Outre une petite restauration, la patronne propose régulièrement, à midi et le soir, des soupes savoureuses et roboratives, dont elle a le secret, ainsi que quelques spécialités de son pays. « Chaque vendredi, je prépare de la morue, selon des recettes de chez nous », précise-t-elle.
Particularité de l’établissement : à l’intérieur, ou sur la petite terrasse à la belle saison, on côtoie autant des locaux, à l’accent bien de chez nous, parcourant 24Heures ou Le Courrier, que des membres volubiles de la communauté portugaise, parfois scotchés sur l’écran du téléviseur qui distille les programmes de Lisbonne. La cohabitation se passe bien ? Cette fois c’est Luis qui répond. Actif aujourd’hui dans la technique dentaire le mari d’Ilda prête volontiers la main à son épouse, une fois son travail achevé : « Ça se passe très bien. Mais le plus souvent, chacun reste dans son coin (rires) ».
Juste avant les fêtes, le couple a récupéré un local attenant au café-bar. Il y a installé une salle de jeux. On y trouve un billard, un jeu de fléchettes électroniques, ainsi qu’une PlayStation. « En ouvrant cette salle, on a pensé aux jeunes », explique la patronne de La Gondolière avant d’ajouter, avec un large sourire : « On les attend ! »