Opinions
L’illusion nucléaire

Yannick Klein, membre du comité des Vert·e·s de Lavaux-Oron | La peur d’un black-out électrique imminent a réveillé le thème de la construction de nouveaux réacteurs nucléaires, la seule option, selon ses promoteurs, pour fournir rapidement une électricité à bon prix, faire face aux pics de consommation hivernale et pour assurer, ainsi, l’indépendance de notre pays. En résumé, la fission c’est la solution ! Mais le nucléaire est-il la solution ou au contraire une illusion ?
Construire un réacteur nucléaire prend du temps, beaucoup de temps. L’exemple du réacteur de Olkiluoto, en Finlande, est édifiant. Lancé en 2005, il a été connecté au réseau en 2021 après 16 ans de travaux et près de 12 ans de retard. Pour la rapidité on repassera donc, d’autant plus qu’en Suisse, le traitement des oppositions et les éventuels recours allongeraient encore davantage les délais.
Relancer le nucléaire cela coûte cher et les dérapages budgétaires sont la norme. L’EPR (European Pressurized Reactor) de Flamanville, en France pourrait coûter 12.7 milliards d’euros, selon l’opérateur électrique EDF, soit près de 4 fois l’estimation initiale. La Cour des comptes française est encore plus pessimiste et estime le coût total à plus de 19 milliards d’euros. Cette dérive incontrôlée des investissements a un impact direct sur le coût de production du mégawatt/heure estimé par cette même cour, à savoir entre 110 et 120 € pour l’EPR de Flamanville contre 45 à 65 €/MWh pour les grandes installations solaires.
De plus, tel un gros paquebot, un réacteur est lent et lourd à manœuvrer. Contrairement aux barrages qui, en quelques minutes, peuvent turbiner davantage d’eau pour répondre aux augmentations soudaines de la demande, le réacteur nucléaire produit de façon constante. Ainsi, le problème des pics hivernaux n’est pas résolu.
Sans parler du mirage de l’indépendance par rapport à nos voisins, car en développant de nouveaux réacteurs nucléaires, la Suisse devrait faire massivement appel à des compétences, des équipements et de l’uranium non disponibles dans notre pays.
Enfin, personne n’a trouvé de solution satisfaisante pour la gestion à long terme des déchets radioactifs qui doivent être stockés, sécurisés et gérés sur plusieurs générations. Un cadeau empoisonné de plus pour les enfants qui nous succéderont.
Si le nucléaire ne répond pas aux enjeux d’une mise en œuvre rapide, d’une production compétitive d’électricité et d’indépendance énergétique, pourquoi miser sur une technologie du passé ? La solution passe sans doute par la combinaison d’une optimisation de notre consommation d’électricité et la volonté résolue d’exploiter le potentiel des énergies renouvelables, notamment solaire et hydraulique.
Il ne fait aucun doute que pour une majorité des 73.5% de Vaudoises et Vaudois qui ont approuvé la stratégie énergétique 2050, dont je fais partie, la relance du nucléaire est une illusion et non la solution aux urgences d’aujourd’hui et aux défis de demain.
Démasquer la censure déguisée

Stépane Doutriaux, Riex | L’éditorial au sujet de la réprimande de Joe Rogan par la plateforme Spotify suite à l’interview qu’il a accordée au Dr McCullough, m’a interpelé. J’aimerais exprimer mon désaccord avec l’auteur.
1.Joe Rogan n’est pas une « chaine de podcasts proposant des positions unilatérales sur la Covid et les vaccins » : Cette personnalité diffuse depuis 2009, et traite une grande variété de sujets (science, sport, politique…) invitant des experts de tous ces domaines à des discussions riches en perspectives. Au sujet Covid, il a par exemple aussi donné libre cours au Dr Michael Oster-holm qui fait partie de l’équipe de gestion de la pandémie du Président Biden.
2.L’auteur insinue que Joe Rogan paie Spotify pour favoriser une version controversée de la science Covid. Rien n’indiquerait une telle aberration. Rogan est grassement payé par Spotify car ce média a acheté les droits exclusifs sur toutes ses émissions; Il est le podcasteur le plus populaire du monde avec 190 millions de vues par mois, et donc apparaît régulièrement en tête de liste car il est très aimé de son audience composée à 50% de diplômés universitaires.
Un point important est soulevé par l’article, qui mentionne l’engagement de Spotify à apposer des notifications d’avis de contenu sur les sujets controversés, pour « guider les auditeurs vers des informations approuvées ». L’auteur fait ici référence au « Trusted News Initiative » signé par les géants GAFAM et dont le but est de « protéger le public contre la désinformation ». Je me demande s’il est bon pour le peuple que toute l’information à laquelle nous pouvons accéder soit filtrée par une entité supranationale opaque contrôlée par Google, Facebook et… Pfizer.
En effet, l’actionnaire très majoritaire de Pfizer, le Vanguard Group, est aussi actionnaire majoritaire de Reuters, l’agence principale en charge de décider de ce qui constitue « La Vérité » depuis la mise en place de ce Trusted News Initiative. Reuters filtre toute l’information des plateformes qui sont aujourd’hui la source primaire du contenu repris ensuite par nos médias. Pour ce qui est du Covid et de la controverse sur le docteur interviewé par Joe Rogan, Il y a un conflit d’intérêt évident à ce que les financiers de « Big Pharma » soient impliqués directement dans la sélection du contenu « approuvé ». Ce que l’on appellait «censure» dans le temps (et dont on critique toujours certains pays comme la Chine) s’est instauré chez nous, déguisée en « Trusted News Initiative », et concerne maintenant toute l’information publiée par Youtube, Facebook, Google, l’AFP, Reuters, et même Wikipédia, donc la majorité de l’information reprise par nos médias nationaux et locaux !
Votre éditorial conclut : « Suivez l’argent, il vous mènera toujours quelque part ». Je suis d’accord, mais pas au sujet de l’argent payé par Spotify à Joe Rogan pour son excellente émission hebdomadaire. Ce cas montre au contraire pourquoi il faut se battre pour permettre l’expression et la diffusion de tous les différents points de vue, et qu’il est très dangereux de demander une censure quand on ne sait pas qui censure. L’accès à l’information est l’un des fondements de la démocratie. Nous avons plus que jamais besoin d’un accès libre aux différents points de vue, sans influence d’argent privé (à la TNI) et sans influence d’argent public : En effet, « subventions » déguisent un contrôle étatique qui constitue un gaspillage qui profite à ceux qui suivent sans questionner l’ordre politique établi. Il est du devoir de l’état de garantir l’accès à toute information (et donc de se battre contre le TNI), et du devoir du citoyen de faire son possible pour soutenir ces médias indépendants qui, de par leur qualité éditoriale, savent attirer l’argent de leurs lecteurs et de leurs fans – comme le fait Joe Rogan. C’est la seule manière d’assurer un débat qui inclue tous les points de vue – même ceux qui peuvent déranger – qui sont si importants pour assurer le bon fonctionnement de la démocratie.